Je me suis rarement posé la question de savoir à quoi je ressemble exactement. A vrai dire, c'est bien loin de mes considérations habituelles mais, depuis peu, je m'y intéresse vaguement, conscient que mon apparence est une arme comme une autre. Comme mon corps a besoin d'être entretenu pour fonctionner correctement. Les gens disent que je suis beau. Si je me poste devant un miroir, je croise tout d'abord un visage à la peau légèrement rosée, porteuse d'un hâle discret mais non moins présent qui met en valeur les cheveux d'un blanc de neige qui encadrent mon visage. Parés de tresses conçues à la va-vite, lors d'un instant de distraction ou de plumes, de diverses choses, ils sont relativement longs mais de longueur tout aussi aléatoire, si bien qu'il m'est impossible de dégager complètement mon visage à moins d'employer un bandeau. Je le fais rarement, mais cela m'arrive. Surtout lorsque je m’entraîne, je me demande ce qui me retient encore de couper cette tignasse parfois gênante... sûrement la sensation agréable du vent qui s'y glisse lorsque je vole. Difficile à dire.
Mes yeux, quant à eux, sont également très pâles, à croire que j'ai été façonné à partir de la neige. Néanmoins l'éclat d'un gris bleuté qui y réside est porteur d'une force et d'une expression qui le rend plus surprenant encore que le reste de ma personne. Je sais que les gens me disent que j'ai un regard perçant, très expressif, avec quelque chose de dur en leur coeur. A en croire le reflet que me rend le miroir, je ne peux que les croire. Nulle glace là-dedans, comme on pourrait s'y attendre, mais la dureté d'une pierre délicate. Je sais que je peux exprimer mon amitié, ma tendresse au travers de mon regard mais cela me paraît difficile à cet instant précis. Parce que je ne ressens aucune tendresse pour moi-même, à peine l'ébauche d'une estime.

Bref. J'ai un visage anguleux aux lèvres charnues, un nez droit, des oreilles souvent dissimulées par les mèches inégales de mes cheveux clairs.
Concernant le reste de mon anatomie... je suis relativement grand, atteignant le mètre soixante-quinze mais ne le dépassant probablement pas. Ma silhouette est fine, déliée, mais indéniablement masculine avec des épaules larges et une musculature soigneusement entretenue. Mais ce qu'il y a probablement de plus remarquable chez moi, ce sont mes ailes. Grandes et possédant une envergure remarquable, elles sont d'un blanc aussi pur que la neige mais chaque plume est achevée, à sa pointe, par un liseré d'or qui pare mes ailes d'un éclat singulier. Unique. Le dessin qu'elles forment ainsi, en leur coeur, est absolument magnifique.

Honnêtement... il n'est pas évident de me décrire. L'un des miens prétends que je suis aussi farouche et indépendant qu'un chat. J'aime à croire que je ressemble plus à ses cousins massifs qu'à la créature chétive qui accompagne les êtres civilisés, en quête de faveurs gustatives ou de caresses. Je me décrirais comme un personnage à la fois prévisible et imprévisible. Selon moi, mes réactions me paraissent logiques mais aux yeux des autres je ne suis pas le moins du monde prévisible. J'agis selon mes propres convictions, ni la Reine ni son opposé prétendument maléfique ne me semble prêt à régner sur Lyrica. La terre, l'île, se suffit à elle-même, et en cela je n'aide ni l'un ni l'autre, mais j'interviens en faveur de celui qui me paraît, sur le moment, le plus juste dans sa décision et dans le but choisit, ce qui me vaux quelques... désagréments des deux côtés. On apprécie rarement l'électron libre qui devient tour à tour un allier précieux et un adversaire redoutable.

Bref, outre ce détail, je suis quelqu'un de très simple. Une après midi au soleil, dans un lieux calme, suffit à me faire plaisir, tout comme un simple gâteau est capable de me faire sourire comme un enfant. Je suis encore capable de me réjouir des plaisirs simples de la vie, tout le monde ne peut pas en dire autant. Je suis aussi quelqu'un de généreux, à mes heures, même si je suis tout à fait capable de vous envoyer chier si vous tombez au mauvais moment. J'ai ma propre façon de raisonner et j'ai un caractère parfois instable, imprévisible, contrairement à mes choix tactiques qui, eux, sont mûrement réfléchis.
Je suis, avant tout, quelqu'un de libre. Contentez-vous de cela, c'est la chose la plus simple et la plus vraie me concernant. N'est pas encore née la personne capable de me contraindre sans en payer le prix.

Je ne me rappelle pas grand chose de ma vie d'avant. Rien du tout, pour être tout à fait honnête. Je pense qu'il s'agit d'un choix que j'ai pris lors de ma renaissance, après une discussion avec la Déesse. Si je ne me souviens de rien de concret, et surtout pas d'une suite logique d'événements, des bribes de ma vie d'avant me reviennent parfois. Suffisamment clairs pour que je sache que je ne souhaite pas m'en rappeler. Le sang, la douleur et la violence prévalent dans cette autre vie, une vie où, j'avais peur de le reconnaître, je m'étais révélé radicalement différent de ce que je suis aujourd'hui. Quelqu'un de cruel et de sans pitié, de ceux qui terrorisent et qui abusent. Heureusement, les souvenirs qui me reviennent sont trop peu nombreux pour m'horrifier réellement, mais savoir que j'ai pu être ainsi me rend malade. Malade et honteux.
De temps en temps, je suis capable de mettre un événement, une histoire à l'une de ces cicatrices qui parcourent mon corps. Elles sont nombreuses avec des tailles ou une gravité qui diffère pour chacune d'entre elles, le peu que je me souviens est assez désagréable. Enfin, assez parlé de ce trou béant qu'est ma vie d'avant, celle que j'ai oublié probablement de manière volontaire.

Si je ne me rappelle pas de ma vie, je me rappelle néanmoins de ce qui fut le monde auquel j'appartenais avant. Un endroit moderne mais pas encore tout à fait, pas autant que ce qu'il semble être à ce jour vu ce que nous racontent les nouveaux venus. J'ignore de quand date ma mort, mais elle remonte maintenant à un certain temps.

Enfin, depuis mon arrivée disons que je me suis intéressé, avant tout, à l'art compliqué du vol. Certains anges se contentent de savoir parcourir les distances, de pouvoir manier les courants comme il se doit... personnellement, je m'intéressais ardemment à toutes les acrobaties aériennes possible et imaginable, l'emploi des courants ascendants et descendants, l'impact de l'orientation subtile d'une aile. Je suis devenu un acrobate volant, un ange capable de combattre dans le ciel avec l'aisance d'un virtuose. Puis, après, à la manipulation de mes pouvoirs. Je n'ai pas grand chose à dire sur ma vie, il n'y a rien de réellement intéressant qui y soit survenu. Des batailles, des combats, des infiltrations. J'ai aidé la Reine puis ce Loemel en fonction de mes convictions, mis des bâtons dans les roues de l'un ou de l'autre parce que leur but ne me convenait pas. Je suis un électron libre dont ils ignorent – pour l'instant – l'identité. Un guerrier sans identité qui n'a pas rejoint l'escadron des Anges et qui erre dans les cieux avec l'intention d'influencer le cours des choses à sa façon.

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